Instrumentalisme vs négationisme

Il y a plus pervers que la négation, l’instrumentalisation.

Le négationniste, aussi condamnable soit-il, a le mérite de la franchise. Il n’avance pas masqué. Il est toujours bon de connaître ses adversaires.

L’ « instrumentaliste » n’en est que plus dangereux, lui qui souhaite vous faire prendre des vessies pour des lanternes.

Mais, quand c’est à la tête de l’état que l’ « instrumentalisme » règne en maître, il y a de quoi s’inquiéter.

Nous avons vécu l’épisode de la dernière lettre de Guy Môquet (à lire à tous les élèves et aux joueurs de la prochaine Coupe du Monde de Football), le tutorat des enfants juifs déportés, et voilà la récidive du pèlerinage aux Glières (largement sponsorisée par l’UMP).

Ras le bol

Malgré tout le respect que je porte à Guy Môquet, combien de jeunes de 17 ans ou moins n’ont pas eu l’occasion de rédiger leur « dernière lettre »,

Malgré toute la compassion que je porte aux victimes de la Shoah (auxquels je joins les tsiganes, les malades mentaux, les handicapés physiques ou mentaux, les jumeaux, les démocrates allemands, les « rouges », les résistants de toute l’Europe, jamais je n’oserai demander à mes fils de porter « leurs cadavres », ils ont bien assez de porter « leurs mémoires »,

Malgré toute la passion que j’ai pour la « République Française », je ne veux oublier :

  • -          Que si les policiers parisiens ont le droit de porter la fourragère rouge pour avoir, à la 25ème heure, libéré la Préfecture de Police, nombre d’entre eux étaient en poste en juillet 1941,
  • -          Qui a occulté pendant longtemps les images qui pouvaient laisser penser que des « Gendarmes » avaient pu surveiller « les camps de concentration » français,
  • -          Que la Gestapo, le SD, n’ont jamais eu besoin d’avoir des effectifs énormes en France trouvant dans les élites (des commissaires de police, des Saint-Cyriens…)  des acolytes forts zélés,
  • -          Que des juges tout ce qu’il y a de plus français ont siégé dans les tribunaux spéciaux,
  • -          Qu’un premier ministre a pu, au nom de la réconciliation (la communion des saints) gracier un (des) assassin(s),
  • -          Que des députés essayent de nous faire croire, aujourd’hui, qu’il ne s’est rien passé à Sétif et, qu’au nom des bienfaits de la colonisation, demain, il ne s’est rien passé non plus à Dakar, Tananarive ou à Hanoï,
  • -          Qu’il existe un Ministère de l’Identité nationale qui, dans un débat inutile, oublie volontairement (pour ne rester à l’époque où cette identité française était en danger) :

-          Le rôle de la MOI (Main d’œuvre immigrée)

-          Le rôle des républicains espagnols (près de 50% des 9 000 déportés de l’Allier – mais ils ont du mal à effacer le nom des batailles (Terruel…) sur les premiers chars entrés dans Paris (« Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré ! libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l'appui et le concours dela France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle. »). Même les « grands hommes » ont la mémoire courte !

-          Le rôle des troupes coloniales à défaut d’avoir des généraux « Rachid ben Rachid », « Yousou Awadi », « N’guyen Mhan », « Jules Ukeiwé »…

Malgré tout le poids de histoire familiale, j’ai peur de croire que pour un simple projet de « Story Telling » des conseillers en communication ont pu choisir les Glières (plutôt que le Vercors, le Mont-Mouchet, les landes de Bretagne ou les forêts limousines … et d’autres) à cause de Tom (un prénom inusuel – la réalité est finalement plus intéressante : « Théodose ») Morel en faisant croire à un non-lecteur de la « Princesse de Clèves » que le Tom en question était un agent de l’OSS parachuté en France.

Mais on comprendra mieux la politique actuelle quand dans le cercle du « Fouqet’s » (ou  pas très loin) on lira la citation de Denis Kessler, ex-vice président du MEDEF : « C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945 et de défaire le programme du Conseil National de la Résistance » (Challenges, 4 octobre 2007).

65 ans après, ce programme, dans la société mondialisée dans laquelle nous vivons, mérite d’être actualisé.

A l’endroit où je suis placé, je mesure la place que peut jouer la révolution numérique dans la révision d’un programme qui avait été intitulé « Les jours heureux ».

On pourra me taxer de nostalgie, mais en mémoire de tous ceux qui se sont engagés, « Les Lendemains qui chantent ! » restent un projet d’actualité pour lutter contre la morosité ambiante.

Une manière de rejoindre les Citoyens Résistants : www.citoyens-resistants.fr